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Le Copiale : décodage d'un manuscrit secret du 18ème siècle

Une équipe de cryptologues composée des linguistes Kevin Knight, de l’Université de Californie du Sud aux Etats-Unis, ainsi que de Beáta Megyesi et de Christiane Schaefer, de l’Université d’Uppsala en Suède, ont déchiffré le code secret d’un document daté du 18ème siècle, le Copiale. Ils ont présenté leurs travaux lors d’une conférence organisée par l’Association for Computational Linguistics et qui se tenait dans l’Oregon, en juin dernier (The Copiale Cipher. K. Knight, B. Megyesi, et C. Schaefer. BUCC, 2011).


Le Copiale est un manuscrit de 150 pages contenant approximativement 75 000 caractères. Il s’agit d’un mélange de symboles abstraits et de caractères romans. Le document, relié avec du papier brocard couleur or et vert, a été découvert à la fin de la guerre froide, dans les archives académiques de l’ex Berlin-Est. Il appartient aujourd’hui à un collectionneur privé. Grâce à un programme mis au point tout spécialement pour l’occasion, les chercheurs ont pu décrypter les 16 premières pages du Copiale. Selon eux, il s’agirait d’un texte révélant les rituels d’une société secrète établie en Allemagne. Il semble que les membres de cette confrérie étaient fascinés par l'ophtalmologie et la chirurgie des yeux, sans pour autant être des spécialistes de cette discipline médicale.

Les linguistes, qui ignoraient le langage utilisé, ont commencé par tester plusieurs langues. Cette méthode les a conduits dans une impasse, si bien qu’ils ont décidé de se fier plutôt à leur intuition. Ils sont d’abord partis du principe
que les lettres romanes contenaient toutes les informations et n’ont pas tenu compte des symboles abstraits. Lorsque cette approche a échoué, ils ont pensé que les cryptographes avaient utilisé la langue allemande et une méthode de codage appelée substitution homophonique. Celle-ci consiste à remplacer une lettre par un symbole choisi au hasard parmi plusieurs. Ils sont finalement arrivés à la conclusion que les lettres romanes étaient destinées à tromper le décrypteur et qu’elles étaient utilisées plutôt comme espace de séparation entre les mots composés de symboles complexes. Les chercheurs ont ensuite appliqué la technique de la fréquence mots attendus pour déterminer quels symboles correspondaient à l’allemand.

Selon Kevin Knight, le décryptage de ce type de document pourrait apporter une vision nouvelle de l’histoire politique du monde. Les historiens pensent en effet que les sociétés secrètes ont joué un rôle important dans les mouvements sociaux du 18ème siècle, comme la Révolution américaine (1775-1783) ou la Révolution française de 1789. Il existe néanmoins peu de preuve puisque les messages sont généralement codés.

Depuis les pionniers de la traduction automatique, comme le scientifique américain Warren Weaver (1894- 1978), quelques messages secrets fameux ont focalisé l’attention des cryptologues. On peut mentionner le code Kryptos qui s’étale sur une sculpture au siège de la C.I.A, par exemple, ou le manuscrit de Voynich, un livre ancien constitué de 234 pages et dont le parchemin aurait été fabriqué entre 1404 et 1438. Le 2 juillet dernier, lors d’une conférence à Portland dans l’Oregon, le Dr. Kevin Knight et sa collègue Sravana Reddy, de l’Université de Chicago, ont présenté une analyse et un bilan des connaissances scientifiques sur le mystère du manuscrit de Voynich (What We Know About the Voynich Manuscript. S. Reddy et K. Knight. LaTeCH, 2011).

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