Notre objet du jour est le journal d'un procès en sorcellerie, dirigé par le Grand inquisiteur anglais Matthew Hopkins, immortalisé en 1968 par Vincent Price dans le film de Michael Reeves, Witchfinder General. L'ouvrage, rédigé par le puritain Nehemiah Wallington (1598-1658) il y a plus de 350 ans, vient d'être digitalisé par une équipe de la John Rylands Library à l'Université de Manchester, afin de rendre son contenu accessible au grand public.
En 1603, le roi d’Écosse Jacques Stuart (1566-1625) monte sur le trône d'Angleterre sous le nom de Jacques Ier. A la fin de l'année, il publie une nouvelle édition de son ouvrage intitulé Daemonologie. En 1604, il convainc également le parlement de révoquer le Witchcraft Act (1563) de la reine Élisabeth 1er et de promulguer une autre loi contre la sorcellerie. Cette nouvelle législation, pour sévère que la précédente et qui reste en vigueur jusqu'en 1736, s'aligne en fait sur ses voisins européens. Ainsi les peines de prisons prévues pour des délits comme l'ensorcellement sont désormais remplacées par la potence, même si la victime du maléfice n'est pas décédée. En revanche la divination ou la fabrication de philtres d'amour sont toujours punis par une année d'emprisonnement ou une heure d'exposition au pilori.
De nombreux éléments de la vie de Matthew Hopkins restent obscures. Il semblerait qu'il se soit octroyé le titre de Chasseurs de sorcières durant les troubles de la guerre civile. Dans la chronique de Wallington, Matthew Hopkins bénéficie du titre de ''Gentle man'' (Gentil Homme). Pourtant, la carrière du chasseur de sorcières et de son assistant John Stearne, dont l'apogée se situe entre 1645 et 1647, s'est soldée par la condamnation et la mort d'une centaine de personnes dans l'Essex et dans d'autres comtés de l'est de l'Angleterre. Dans un article publié dans Orders of the Day, Carol Buckley estime même ce chiffre à 200. Le procès qui se tient à Manningtree, le village natal d'Hopkins, est le plus brutal de cette croisade contre les sorcières.
En mars 1645, il est désigné par les magistrats locaux pour soumettre Elizabeth Clarke à la Question. La sorcière présumée est soumise à une inspection physique minutieuse. Il s'agit de repérer la marque du diable, c'est-à-dire une verrue, un grain de beauté ou une excroissance de chaire qui pourraient servir de tétines à des êtres maléfiques. Soumise à la torture, Elizabeth Clarke dénonce plusieurs personnes, parmi lesquelles Anne West et sa fille Rebecca. Toutes deux sont arrêtées et conduites au château de Colchester pour interrogatoire. La jeune Rebecca confesse avoir eu des relations charnelles avec le diable et prétend que sa mère est impliquée, à l'instar de plusieurs autres femmes de son entourage. L'auteur rapporte également que Rebecca a vu les flammes de l'enfer disparaître dès qu'elle a été séparée de sa mère.
En juillet 1645, les prisonnières sont conduites aux assisses du comté à Chelmsford pour y être jugées sans représentant légal. Bien que le procès se déroule dans une atmosphère chaotique, toutes les accusées sont déclarées coupables, exceptée la jeune délatrice, qui a ainsi sauvé sa peau. Quinze sont pendues à Chelmsford, quatre sont conduites à la potence jusqu'au village de Manningtree et neuf sont finalement graciées. Matthew Hopkins, quant à lui, succombe à la tuberculose en août 1647.
Nehemiah Wallington était un homme ordinaire qui vécut à une époque troublée. A sa mort en 1658 (à l'age de 60 ans), il avait été témoin d'une épidémie de peste bubonique (1647-1652), de l'oppression religieuse, de la révolution et de guerre civile qui s'était conclue par l’exécution du roi Charles 1er d'Angleterre. Les historiens pensent que ses écrits s'inspiraient largement des pamphlets contemporains. Son manuscrit se trouve aujourd'hui à Tatton Hall dans le Cheshire.
The witchfinder general - Michael Reeves
envoyé par Blame2Workshop. - Court métrage, documentaire et bande annonce.
Source: Telegraph et BBC