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Les femmes vikings étaient-elles des ménagères ou des conquérantes ?

Dans le célèbre Comics américain Hagar the Horrible (Hägar Dünor le Viking, dans sa version française), Helga (Hildegarde), son épouse refuse de se laisser enfermer dans son le rôle de souveraine "innan stokks hýbýli" (enceinte sacrée du domicile) et exige que son mari participe davantage aux tâches ménagères, plutôt que de passer son temps "útan stokks" (à l’extérieur). Un article paru dans la revue scientifique Early Medieval Europe montre, en effet, que les femmes de vikings, ne restaient pas sagement à la maison pendant que leurs hommes partaient à la conquête du monde.


Selon Shane McLeod, maître de conférence en histoire médiévale à l'UWA (University of Western Australia), l'étude des sépultures prouvent que les femmes scandinaves ont immigré en Angleterre, dès les premières invasions au 9ème siècle. Ces campagnes sont rapportées dans la Chronique anglo-saxonne, les annales rédigées dans le Wessex sous le règne d'Alfred le Grand (vers 846- 899), et on sait que les Vikings ont fondé le royaume de Danelaw, qui s'étendait sur le nord et l'est de l'Angleterre et où s'appliquait la loi des Danois. La Chronique anglo-saxonne ne mentionne ni femme ni enfant lors de la première vague d'invasion, dans les années 870. Durant la seconde campagne de colonisation, dans les années 890, il est surtout question d'enlèvement d'enfants scandinaves, ainsi que de la capture du chef viking Hasting ou Haesten (vers 810-893) et de son épouse.
En 1087, le Domesday Book (en français Livre du Jugement Dernier), le grand inventaire de l’Angleterre réalisé pour Guillaume le Conquérant (1027-1066), recense 400 colonies vikings masculines et seulement 21 féminines. Enfin, les sites archéologiques de Repton et de Heath Wood, dans le Derbyshire, ont révélé, dans un premier temps, que seulement 17% des sépultures appartenaient à des femmes, dont la majorité aurait été anglo-saxonne plutôt que d'origine danoise.


Jusqu'à aujourd'hui, les historiens ne disposaient donc que de preuves minimes d'une migration féminine en Angleterre. La découverte de bijoux, comme les broches, montraient que les femmes avaient participé à l'invasion mais on pensait qu'elles étaient en sous-nombre, comparé à leurs homologues masculins. Or, ces vingt dernières années, les chercheurs ont exhumé des tombes féminines, contenant des bijoux ou des robes, et indiquant que les envahisseuses étaient plus nombreuses qu'on ne l'imaginait.
Le Dr McLeod cite une série de 14 sépultures danoises, dont six ont été identifiées comme appartenant à des femmes, sept à des hommes et une indéterminée. Les ossements ont pu être identifiés grâce à des analyses isotopiques, qui ont permis de déterminer la date approximative et le lieu de naissances des défunts. Par ailleurs, pour déterminer le sexe des individus, les chercheurs ont favorisé l'étude ostéologie, plutôt que de se fier à la présence d'objets soi-disant dédiés (comme les sabres et les poignards) dans les sépultures. Sur le site de Repton, par exemple, trois tombes contenant des épées ont finalement été attribuées à des femmes. L'une d'entre elles contenait même un bouclier.
Bien que les résultats présentés par Shane McLeod ne permettent pas de déterminer le nombre exact de colons féminins, il apparaît que le ratio homme/femme doit être revu à la hausse. Selon le chercheur, il pourrait être d'un tiers, voire de 50%.


Les travaux de Shane McLeod semblent confirmés par ceux d'Anne-Sofie Gräslund, professeur d'archéologie à l'Université d' Uppsala en Suède. Dans The Position of Iron Age Scandinavian Women: Evidence from Graves and Rune Stones, un article paru en 2001 dans un ouvrage intitulé Gender and the Archaeology of Death (pages 81-102), elle défend la théorie selon laquelle le nombre de tombes guerrières féminines était équivalent à celui des tombes guerrières masculines, mais que les fonctions des unes et des autres étaient différentes. Les femmes devaient prendre soin du foyer, durant l'absence de leur époux. Il ne s'agit pas d'un rôle mineur puisqu'il leur donnait l’occasion d'acquérir d'importants pouvoirs. La chercheuse suédoise cite l'exemple de Thyra Klacksdotti, épouse de Gorm le Vieux, roi du Danemark entre 936 et 958. Cette puissante souveraine aurait dirigé le Royaume en l'absence de son époux et levé une armée contre ses ennemies de Francie orientale (Germanie). Elle est mentionnée dans La Geste des Danois, rédigée par le moine Saxo Grammaticus (v. 1150 - v. 1220). Ce texte raconte qu'il y avait autrefois au Danemark des femmes qui s'habillaient comme les hommes et qui passaient la majeure partie de leur temps à s'entraîner au combat.

Sources:
1.Invasion of the Viking women unearthed par Dan Vergano
2.Viking Women: A Reinterpretation of the Bones par Katy Meyers

Images:
1.Image du film Viking Women and the Sea Serpent de Roger Corman, 1957
2.Reconstruction facial d'une viking par les chercheurs de l'Université de Dundee en Écosse. Le squelette, vieux de plus de 1000 ans, a été découvert dans la ville de York dans les années 1970.
3.Copies de broches ovales trouvées près de Lousgard, sur l'île de Bornholm au Danemark et datant de la fin du 7ème siècle ou du début du 8ème siècle.

Références
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  1. http://www.les-couloirs-du-temps.fr/t525-Le-bateau-funeraire-viking-d-Ardnamurchan.htm
  2. http://laitdejument.forumactif.org/t250-femme-et-combat-a-l-epoque-viking
  3. http://lesgardiens.forumsactifs.net/t90-ressources-historique-sur-internet
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