On se doutait que les conditions de vie des marins du 19ème siècle n’étaient pas très confortables mais il semblerait qu’elles étaient encore pires qu’on ne l’imaginait. Une équipe de chercheurs des universités d’Oxford et de Cranfield au Royaume-Uni, a réalisé une étude ostéologique portant sur 340 squelettes exhumés des cimetières de la Royal Navy à Greenwich, Gosport et Plymouth.
Ces hommes ont servis sous les ordres du vice-amiral Horatio Nelson (1758-1805), le héros de la bataille de Trafalgar, une victoire obligeant Napoléon à renoncer à ses rêves de conquête en Angleterre et marquant la suprématie britannique sur les mers. Les résultats de leurs recherches ont été présentés le 4 septembre dernier dans un documentaire de la chaîne anglaise Channel 4 et intitulé Nelson's Navy: Back From the Dead.
Ceri Boston, du département d’archéologie d’Oxford, et Catherine Sinnott, du laboratoire des sciences appliquées de Cranfield, ont constaté de façon plus surprenante qu'une minorité d'engagés étaient issus de milieux modestes. L'étude montre que de nombreux marins ont succombé au scorbut ou à des infections nées dans de petites coupures ou à des éraflures. Le scorbut, qui est une maladie due à une carence en vitamine C, paralyse le système immunitaire. Les hommes d’équipage, soumis à la malnutrition, étaient victimes d’infections mortelles comme le paludisme ou le typhus. De nombreux marins souffraient également de la syphilis, de la malaria, d'ulcères et d'infections dentaires. Par ailleurs, les scientifiques ont constaté que 6% des marins avaient subi des amputations auxquelles ils n’avaient pas survécus (cf Journaux et rapports médicaux de la Royal-Navy au 19ème siècle).
Les ostéologues se sont également intéressés à l'age moyen des marins. A Plymouth, 1/5ème des 170 squelettes étudiés appartenait à des adolescents et que certains n'avaient pas plus de 10 ou 11 ans. Ces garçons occupaient le poste de "Powder monkeys" et devaient transporter le plus rapidement possible les stocks de poudre depuis la cale jusqu'aux cannons. Ils étaient recrutés pour leur agilité. La majorité d'entre eux sont morts de la malaria ou de la fièvre jaune. Beaucoup de ces jeunes gens ont navigué dans l'océan Atlantique et aux Caraïbes. A Gosport, les scientifiques ont exhumés 50 individus et constatés que presque tous les hommes étaient âgés de 20 à 30 ans au moment de leur mort. Les 120 marins enterrés à Greenwich étaient des vétérans. Bien qu'ils soient parvenus à l'age mur, la plupart présentaient de nombreuses traces de blessures. Le site de Greenwich a accueilli le Royal Hospital for Seamen jusqu'en 1869. Cet hôpital militaire a été fondé pour accueillir les marins blessés bénéficiant d'une pension de retraite.
Images: National Maritime Museum